| Dr Mathieu Morau | équidé,
Les parasites digestifs du cheval sont présents partout et tous les chevaux sont concernés ! Toutefois le risque varie fortement d’un animal à l’autre en fonction du mode d’élevage, du parasite ainsi que des défenses individuelles. Il est d’ailleurs illusoire de vouloir supprimer complètement les parasites de votre animal.
L’équipe de la clinique du Vic Bilh a rédigé cette page pour vous résumer les enjeux de la vermifugation et vous permettre d’adapter au mieux vos pratiques.
Le cheval et ses parasites
Du fait de leur comportement alimentaire, les chevaux sont susceptibles d’être contaminés par une grande variété de parasites gastro-intestinaux, que ce soient les chevaux ayant en permanence accès à une pâture mais également les chevaux en box, avec un risque moindre.
Les principaux parasites des équidés sont les strongles, les ascaris, les ténias, les gastérophiles et les oxyures. Chaque parasite possède un cycle qui lui est propre, avec une phase extérieure et une phase à l’intérieur de l’organisme du cheval.
Les strongles
Répartis en deux familles (petits strongles ou cyathostomes et grands strongles), sont les plus pathogènes. Ils peuvent être à l’origine de diarrhées et coliques parfois très graves. Le cheval s’infeste en mangeant les larves présentes sur l’herbe. Après un cycle variable selon les espèces de parasite, les œufs sont émis dans le crottin. Ce sont eux que l’on peut détecter par coproscopie.
Les ascaris
Ils sont plus rares et concernent principalement les écuries d’élevage, surtout les poulains. Le ver adulte vivant dans la lumière de l’intestin grêle peut atteindre 50cm. Dans nos conditions où la pression est faible, la plupart des cas restent asymptomatiques, même si des cas graves existent.
Les ténias
Ils sont des vers plats qui contaminent les chevaux la plupart du temps à l’automne. Selon l’espèce, les conséquences cliniques sont variables. Les vers ne pondant pas tout le temps, il est possible de passer à coté d’une infestation par coproscopie.
Les gastérophiles
Ils sont les petits œufs que vous voyez collés sur les pattes de vos animaux à l’automne. Ils sont pondus par de grosses mouches qui ressemblent à des abeilles. Les chevaux les ingèrent en se grattant avec la bouche. Même en grande quantité, leur impact reste très limité.
Les oxyures
Ce sont des vers pondus aux marges de l’anus. Le seul impact est le grattage lié aux démangeaisons intenses.
Les traitements des chevaux contre ces parasites sont réalisés principalement par voie orale, grâce à plusieurs molécules, parfois combinées. Toutes n’ont pas le même spectre d’action et il est primordial d’adapter les traitements aux risques réels des animaux.
Si par le passé, un protocole de 4 vermifuges par an et par cheval était recommandé, on s’est aperçu depuis que deux problèmes majeurs viennent remettre en question ce dogme.
Deux problèmes majeurs : la résistance aux antiparasitaires et l’impact environnemental
Le premier obstacle rencontré par la gestion parasitaire est l’apparition de résistance des parasites aux molécules utilisées. Comme pour les bactéries et les antibiotiques, les parasites peuvent acquérir par sélection des mécanismes de résistance, qui diminue l’efficacité des traitements.
Ces résistances commencent à poser des très gros problèmes dans les filières ovines et caprines, avec parfois une impossibilité de traiter les animaux. Bien que moins fréquents chez les chevaux, des résistances sont régulièrement mises en évidence pour certains parasites.
Notre arsenal thérapeutique étant limité, il est important d’adapter les protocoles pour éviter l’apparition de résistances. Plusieurs modes d’utilisation aggravent leur apparition et sont à bannir : sous-doser les traitements, utiliser systématiquement la même molécule, traiter trop souvent.
Le second point négatif fondamental est l’effet sur l’environnement. Quand vous vermifugez votre cheval, la molécule se retrouve dans les crottins, sous une forme toujours active ! Elle tue alors de nombreux insectes qui se nourrissent des crottins ou à proximité. Les plus connus sont les bousiers. Par effet domino, il y a moins de nourriture pour les oiseaux, les bouses sont moins dégradées et la biodiversité en pâtit ! Certaines molécules peuvent être détectées pendant plusieurs mois dans les crottins, voire plus d’un an pour la doramectine.
Cet effet néfaste est très variable selon les molécules employées, en particulier en fonction de leur rémanence (durée d’efficacité). L’impact maximal se situe au printemps, période où les insectes sont les plus présents. Il faut donc raisonner au maximum l’utilisation des vermifuges en tenant compte de la saison et du milieu de vie du cheval.
Le bon traitement, c’est celui réalisé au bon moment !
Ce que nous vous conseillons : guide des bonnes pratiques
i. Cibler quel cheval a besoin d’être vermifugé
Au sein d’un même effectif, l’infestation de chaque individu peut varier fortement, en particulier pour les strongles. On considère que sur 5 chevaux, en moyenne un seul est très parasité et a besoin de traitement. Ne pas traiter les animaux peu infestés limite l’apparition de résistances !
Un outil permet de déterminer le niveau d’infestation de l’animal : l’analyse coproscopique. Il s’agit du comptage des œufs de vers dans le crottin (en œufs par gramme ou opg). Il est possible de compter les œufs d’ascaris, de strongles et de ténias. Toutefois, du fait de l’excrétion intermittente des œufs de ténias, une coproscopie négative ne permet pas d’éliminer une infestation par ce parasite. En réalisant des coproscopies tout au long de la saison, on peut apprécier malgré ça le niveau d’exposition du troupeau.
Comment faire une coproscopie ?
Rien de plus facile ! On récolte un ou deux crottins de chaque cheval et on les conserve individuellement au frais le temps de les amener à la clinique.
Seul impératif, il est important de récupérer le crottin juste après son émission. Petite astuce : rentrez votre cheval au box. En général il se fait un malin plaisir de faire des crottins immédiatement !
Coût : 12€ TTC la première analyse puis 9€.
Quand faire une coproscopie ?
La période à risque pour les parasites est essentiellement du printemps à l’automne. Il est donc conseillé de réaliser des coproscopies régulièrement entre avril et novembre.
Nous vous conseillons au moins un examen en mai-juin et en un en septembre.
Comment interpréter le résultat de la coproscopie ?
- Strongles
- < 200 opg : Faible excréteur => pas de vermifugation
- Entre 200 et 500 opg : traitement à discuter avec nous
- > 500 opg : fort excréteur => vermifugation
- Ténias : si présence, un traitement en fin d’automne. A discuter si les coproscopie sont toujours négatives.
- Ascaris (cas particulier des poulains) : traitement si présence.
ii. Contrôler l’efficacité des traitements après l’utilisation
Vu les résistances existantes, il est fondamental de vérifier que le traitement administré a été efficace. Il faut pour cela renouveler la coproscopie 14 jours après le traitement.
En comparant avec le premier résultat, on peut déterminer le niveau de résistance à chaque molécule dans l’élevage. Un résultat d’au moins 90% est attendu.
iii. Bien gérer ses prairies, pour limiter la nécessité des traitements
La gestion des prairies permet de réduire fortement la pression d’infestation. C’est le moyen préventif le plus efficace contre les verminoses afin d’éviter au maximum les traitements. Les mesures suivantes sont recommandées :
- Ramasser les crottins régulièrement.
- Limiter la charge à l’hectare des prairies : 1 à 2 chevaux/ha.
- Tester tout nouveau cheval et le traiter en cas de résultat positif.
- Favoriser le copâturage (ou alterner) avec des ruminants car les ruminants et les chevaux n’ont pas les mêmes parasites (attention toutefois à la douve en milieu humide).
- Conduite des pâturages avec une rotation toutes les 3 semaines ou selon la hauteur d’herbe.
- Maintenir une population refuge de parasites non exposés au vermifuge (pour diluer le nombre de parasites résistants avec les parasites sensibles) en ne traitant que les individus qui en ont besoin.
Finalement, raisonner l’utilisation des traitements antiparasitaires, c’est bon pour tout le monde :
- Votre cheval, qui n’est traité que s’il en a vraiment besoin.
- L’environnement : ne pas oublier que toutes ces molécules ont un effet sur la biodiversité.
- Le portefeuille : moins de traitement = économies.
N’hésitez pas à nous demander conseil !